Mardi
17 décembre
… déconnecté
mais en sécurité!
Petite
frustration aujourd'hui... voilà maintenant cinq jours que je
n'arrive pas à avoir accès à l'internet. L'horaire
est très chargé – ce qui, en soit, est une très bonne chose –
et rares sont les moments où on peut s'asseoir devant l'ordinateur.
Entre les coupures d'électricité aléatoires d'une journée à
l'autre, l'absence de réseau là où nous habitons et la lenteur
légendaire du débit lorsque nous arrivons à nous connecter cinq
minutes, il devient quasi-impossible de garder contact avec ses
proches. Pour faire exprès, l'internet a été coupé à
l'IFT aujourd'hui... parce qu'ils n'ont pas payé la facture!
L'institut Français du Tchad n'a pas payé sa facture!!... trop
fort. Il parait que ça arrive... on priorise le paiement des
employés et on attend quelques jours pour payer le reste. Dans tous
les cas ce ne sont que des rumeurs et moi, je ne suis qu'un vulgaire
rapporteur. N'empêche que c'est cocasse.
Je
sais qu'on doit commencer à s'inquiéter de l'autre côté et je
n'ai aucun moyen de rassurer qui que ce soit. Pourtant, les tensions
en Centrafrique ne portent aucun ombrage au soleil vibrant de
N'Djamena. On se sent en
sécurité. Les troubles sont plus au sud, loin de la ville. Aucune
inquiétude, donc. D'autant plus que c'est la fête de la liberté
ces jours-ci (elle se déroule à l'extérieur de N'Djamena), donc la
majorité des militaires sont hors-la-ville. Je suis bien curieux de
ce qu'on fête comme liberté sous un régime comme celui de
Deby.
Voilà
maintenant une semaine que je suis ici. Voilà maintenant une semaine
que je fais de superbes rencontres et je découvre une ville et un
mode de vie à mille lieues de tout ce que j'ai pu avoir comme
références. C'est une expérience extraordinaire, grandiose et
troublante.
Ce matin, je travaillais pour la deuxième fois
avec l'actrice, marionnettiste et conteuse Virginie Tokari. Nous
avons continué de chercher l'alliage clown-conte. Le clown est si
peu connu ici, les références sont si minces que c'est un réel
défi d'arriver à quelque chose de satisfaisant. On y est arrivés
doucement. On part du conte qu'elle nomme « La grenouille et le
crapaud ». Pour les besoins de la cause, la conteuse a besoin
d'un assistant. Je viens jouer le crapaud et, bien entendu tout part
en couille. Je deviens tous les personnages, je m'empêtre... Elle
arrive à peine à raconter son histoire. On est dans le classique
clown rouge/clown blanc. Suite à l'expérience de mardi soir
dernier, je m'interroge beaucoup sur la façon d'aller chercher le
public d'ici, de le faire embarquer dans le style et d'arriver à ce
qu'il se laisse aller. Les réactions sont si franches et si
directes... on est loin du petit judéo-chrétien tranquille calé
dans son siège qui, s'il ne comprend pas ou n'aime pas, en parlera à
demi-mots sur le chemin du retour. Ça se passe là, maintenant, en
direct!
En
après-midi, ateliers dans le quartier de Chagoua auprès d'un groupe
d'adolescents qui, franchement, impressionne! Le responsable de la
maison de quartier est un homme dynamique, et celui qui s'occupe de
faire du théâtre avec eux est un vrai passionné. Du coup, il a su
transmettre cette étincelle à ses élèves. Ils cherchent, ils sont
attentifs, présents, rigoureux, curieux... ce sont eux qui montent
des spectacles à l'extérieur du contexte des ateliers!! Le défi :
la langue. Ce sont tous des jeunes qui ont des difficultés en
français – et comme je ne parle pas le patois... Par contre,
aussitôt qu'ils ont saisi, ils se lancent. J'ai donc fait beaucoup
plus de démonstrations aujourd'hui. Un film était présenté juste après mon atelier. Plein de gens sont venus s'entasser sur les bancs afin de regarder le long métrage, projeté sur un mur.
Cinéma, version Chagoua.
Aujourd'hui
nous déménageons chez Taïgue, qui vit dans une concession du
quartier Abdel-Djoumal. Nous y serons très confortables. Il quitte
pour l'Allemagne. Nous poursuivrons donc le séjour avec Yaya et
Aboubakar comme ange-gardiens. Même s'il est triste de voir Taïgue
partir si rapidement, nous savons que tout est en place pour penser
et bâtir la suite de notre collaboration – c'est à dire
l'intervention dans les camps. Dans tous les cas on est bien lancés
pour la suite de ce séjour-ci et on ne se sent aucunement
abandonnés. L'horaire est d'ailleurs complètement chargé jusqu'au
lundi 23 décembre. Entre les ateliers, les rencontres, les
répétitions, les représentations, il ne nous reste qu'une toute
petite plage de 3h le lundi PM! Comme nous l'a dit Taïgue, ce n'est
pas plus mal que nous puissions entrer en contact avec les artistes
sans qu'il soit toujours là. Cela nous permet de développer un
contact plus particulier avec eux.
Je
sens que ça va passer vite... Oh oui! Ce matin j'ai pris, pour la
première fois dans ma vie, le moto-taxi (appelé « clando »).
Ils sont là, à tous les quelques coins de rues, attendant des
clients. S'ils passent, on les appelle d'un « sssst! »,
ce son (complètement impoli d'un point de vue nord-américain... je
vais m'y faire...) qu'on emploie beaucoup ici pour appeler les gens,
serveurs, etc. et qui capte leur oreille malgré les bruits les plus
assourdissants. Le clando coute très peu cher (à partir de 150
FCFA... environs 30 sous). On me recommande de ne pas l'utiliser la
nuit – c'est plus risqué.
Bonne
nouvelle : nous aurons désormais accès à un modem portable.
Je devrais donc pouvoir mettre le blog à jour plus régulièrement!...
à moins que l'horaire ne nous dépasse.
Les graffitis que l'on retrouve partout dans les maisons de quartier...
… sont plutôt éloquents.
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